avec Anna Maria Vartolomei, Luàna Bajrami, Louise Orry-Diquéro

drame France, 1h40 2021,

« France 1963. Anne, étudiante prometteuse, tombe enceinte. Elle décide  d'avorter; prête à tout pour disposer de son corps et de son avenir. Elle s'engage seule dans une course contre la montre bravant la loi. Les examens approchent, son ventre s'arrondit ».

La forme de L'événement s'apparente plus à un documentaire qu'à un film cinématographique. On se rendra donc dans une salle obscure pour le fond, le propos, et le témoignage. On ressortira bouleversé, prêt à arracher la langue à toute personne qui oserait dire « c'était mieux avant ». Audrey Diwan ne propose pas seulement un tableau de la société française à la veille de mai 68, mais également le portrait intime d'une jeune fille qui sait ce qu'elle veut. 

Avant la pilule contraceptive (1967), " tomber " enceinte s'apparente à un terrible jeu de hasard. Cet état de fait pèse sur les relations filles/garçons. L'épée de Damoclès au-dessus des têtes féminines créée tensions et frustrations.

Avant le droit à l'avortement (1975), ce jeu de hasard peut tourner au cauchemar. Avoir un enfant implique d'arrêter ses études et de se marier. Ne pas vouloir cet enfant revient à braver la loi et de risquer sa vie. L'avortement étant illégal, il est passible de prison. Les conditions des avortements clandestins peuvent déboucher sur la mort. Ces perspectives sont terribles et causent une horrible solitude pour celles qui veulent aller jusqu'au bout et rester libre de leur corps et de leur avenir. C'est ce qui choque certainement le plus dans le parcours d'Anne.

Elle est seule pour affronter ses peurs. Même entre jeunes gens du même âge, on ne trouve pas la solidarité qu'on pourrait imaginer. Anne devra batailler et ne compter que sur elle-même.

Il semble impossible qu'elle se confie à ses parents, si fiers que leur fille fasse des études.

Ses amis lui tournent le dos, refusant qu'elle fasse d'eux de potentiels complices. Les médecins ne sont au mieux que compatissants quand ils ne sont pas hostiles. Les professeurs ne sont pas envisagés comme d'éventuels confidents d'infortune. 

Son petit ami éphémère semble bien peu préoccupé par les aspects techniques qu'Anne doit gérer.

Audrey Diwan, sans avoir le désir de choquer, a voulu montrer les scènes de souffrance. Cet aspect lié à la question sociétale de l'avortement est fondamental. On ne peut pas faire l'impasse sur la douleur subie par de nombreuses femmes, sur les risques pris dans le seul but de rester libres de leur vie

L'événement est un film poignant. Un témoignage important pour ne jamais oublier qu'il ne faut pas céder un pouce à tout ce qui pourrait être un retour en arrière sur le droit des femmes.