L'affranchie de Montmartre
Delfino Jean-Paul
2
Istya & Cie, 2024
Paris, 1938. Suzanne Valadon l'a promis au grand écrivain Francis Carco : elle qui a menti tout au long de sa vie, va enfin dire la vérité sur son existence chaotique. Elle va raconter, avec ses mots, son enfance misérable dans le Paris de la Belle Époque, sa carrière de modèle , l’illumination par la peinture, la gloire, la déchéance…
Avec son humour savoureux et coutumier, Jean-Paul Delfino rend un bel hommage à une artiste peintre hors du commun. Par la même occasion, il embarque son lecteur avec brio dans une époque, un quartier, une ambiance.
Née en 1865 Suzanne Valadon a eu mille vies , changeant de nom à chacune. Enfant d'une mère illettrée, alcoolique et d'un père inconnu, elle côtoie la grande misère une grande partie de sa vie.
Nous sommes en 1938, Suzanne Valadon, malade et très diminuée entreprend de raconter sa vie sans mensonge… aucun… ou un peu quand même… ou beaucoup… Parce que c'est un sacré personnage.
Elle a vécu des périodes charnières : le passage du Montmartre village au quartier touristique de Paris, de la capitale où déambulent les charrettes aux rues investies par les moteurs, de la peinture de Renoir à l'arrivée de l'art abstrait.
Rien ne la destinait à la carrière d'artiste et pourtant elle deviendra une peintre révolutionnaire. Ce chemin sera celui d'une forte personnalité mais également le fruit de rencontres qui ont changé sa vie.
Modèle des plus grands comme Renoir, elle deviendra leur égale .
On rencontre dans ces pages l'original Erik Satie, l'émouvant Toulouse-Lautrec, le visionnaire Degas…
Si le chemin est ardu, la Valadon, comme elle est souvent nommée à l'époque, se veut libre dans une temporalité et un domaine qui n'est pas celui des femmes.
Quelle gouaille ! l'auteur nous fait rire avec des dialogues savoureux qui sont dans la parfaite lignée de l'ambiance montmartroise qu’il nous décrit.
Dans cette biographie romancée, il est forcément question du célèbre peintre Maurice Utrillo puisque c'est le fils de Suzanne. Mais pour une fois celui-ci (dont la vie est tout aussi romanesque que celle de sa mère) n’éclipse pas le talent de la Valadon.
L'auteur a la délicatesse de ne jamais perdre son héroïne de vue.
Ce livre ravira les lecteurs de Jean-Paul Delfino, attachés à son style imagé à la fois drôle et poétique, mais aussi ceux qui veulent découvrir une femme au caractère bien trempé, tout autant que ceux qui aiment imaginer le Paris au tournant de la fin du XIXe siècle.