Grasset, 2024

« Quel secret cache l'ombre du Jacaranda l’arbre fétiche de Stella ? Il faudra à son ami Milan des années pour le découvrir. Des années pour percer les silences du Rwanda dévasté après le génocide des Tutsi. En rendant leur parole aux disparus, les jeunes gens échapperont à la solitude. Et nous trouverons la paix près des rivages magnifiques du lac Kivu. »

Après Petit pays, Gaël Faye signe de nouveau un excellent roman. À  travers les liens entre quatre générations, on découvre l'histoire du Rwanda mais également les multiples conséquences d'un génocide d'une violence difficilement soutenable.

Milan, le personnage principal dont la mère tait sa vie au Rwanda,  va aller à la découverte de ce pays et de son histoire familiale. Son ignorance est la nôtre et son parcours nous instruit sur une histoire dont nous n'avons eu que quelques bribes à travers les journaux télévisés, lors du massacre de 1994.

Chaque personnage de Jacaranda est un pan de la mémoire du pays. Chacun  porte, soit le passé, le présent ou l'avenir d’une nation traumatisée par des luttes fratricides.

La génération la plus  ancienne garde le souvenir de la colonisation et de la montée des tensions aidant ainsi le lecteur à mieux comprendre l'organisation sociale et politique du Rwanda.

La plus jeune génération qui n'a pas connu les massacres souffre du poids de la mémoire. Il pèse sur ces  jeunes une injonction au bonheur et à la réussite, bien lourde. N'ayant pas souffert comme leurs parents, on leur refuse le droit de se plaindre.

Entre les deux, il y a les jeunes adultes et les enfants victimes directes ou indirectes des violences.

Ceux qui ont tout perdu, ceux qui ont été touchés dans leur chaire...

Toutes les conséquences du génocide sont évoquées : la mère de Milan reste mutique sur son passé et son pays. Le souvenir est insoutenable pour elle et elle estime que ce n'est pas l'histoire de son fils né en France. Eusébie elle, a choisi de retourner au Rwanda et s'est engagée pour la reconstruction de la nation. Claude, lui, ne rêve que de vengeance. 

Le témoignage, l'importance de la mémoire et la difficulté de la réconciliation sont au cœur de ce très beau roman. On s'attache aux différents personnages. On est avide de savoir ce qu'ils vont découvrir pour certains, dévoiler pour d'autres, mais aussi de comprendre leur évolution et choix de vie.

Si comme dans Petit pays la haine et le déferlement des atrocités du génocide nous restent incompréhensibles, Gaël Faye offre une lecture éclairante et bouleversante.