Leurs enfants après eux
Ludovic et Zoran Boukhera
1
avec Paul Kircher, Angelina Woreth, Sayyid El Alami, Gilles Lellouche, Ludivine Sagnier
Drame, 2h21, 2024
« Août 92. Une vallée perdue dans l'Est, des hauts fourneaux qui ne brûlent plus. Anthony, 14 ans, s'ennuie ferme. Un après-midi de canicule au bord du lac, il rencontre Stéphanie. Le coup de foudre est tel que le soir même, il emprunte secrètement la moto de son père pour se rendre à une soirée où il espère la retrouver. Lorsque le lendemain matin, il s'aperçoit que la moto a disparu, sa vie bascule… »
Tiré du roman éponyme de Nicolas Mathieu, ce film nous inspire les mêmes réflexions que celles ressenties à la lecture du livre qui avait obtenu le prix Goncourt en 2022.
Sur quatre étés, entre 1992 et 1998, on suit Anthony aux prises avec ses sentiments pour son premier amour inaccessible. Comme le roman, on est plus dans une histoire sur l'adolescence que sur les conséquences de la désindustrialisation d'une région.
Il ne suffit pas de montrer des hauts fourneaux à l'arrêt pour faire un film social.
Dans ces longs étés caniculaires, on semble s'ennuyer autant chez les bourges que chez les prolos.
Paul Kircher est très bon dans le rôle d'Antony durant les deux premiers étés. Il a les attitudes parfaites de l'adolescent, mal dans sa peau, un peu gauche, qui se cache derrière ses cheveux !
Malheureusement son jeu n'évolue pas, ce qui pourrait laisser penser qu'il est un " peu simplet ", durant les deux étés suivants.
Les marqueurs sociaux sont essentiellement visuels : Stéphanie dans la grande maison avec piscine, Anthony dans la petite maison d'ouvrier, Hacine, l'ennemi juré, dans la cité désolée.
Malgré tout on ne ressent pas assez que la fracture sociale peut-être un nœud important dans les rapports compliqués entre ces adolescents. Dans ce domaine, les tensions paraissent bien exessives !
Deux aspects du film le sauvent d'un ennui qui pourrait être total. L'importance de la bande-son soulignant les quatre périodes qui découpent le film. Les morceaux choisis font plus que de restituer une ambiance, ils sont le reflet d'un état d'esprit de la jeunesse à différentes époques.
En deuxième lieu, le personnage du père d'Antony est sans doute le plus intéressant.
Gilles Lellouche incarne excellemment bien le rôle du père. Sa violence n'a pas besoin d'être filmée, elle est en permanence latente et son entourage, comme le spectateur, sent bien qu'elle peut exploser à tout moment. La disparition de sa moto, qu'il n'utilise plus mais à laquelle il semble tenir comme à la prunelle de ses yeux est le point de bascule de la vie du jeune Anthony mais pas seulement. C'est aussi celui de son père dont on va voir la lente mais irrémédiable dégradation. C'est son histoire dont on aurait aimé la mise en avant