Les choses humaines
Tuil Karine
2
Gallimard, 2019
“Les Farel forment un couple de pouvoir. Jean est un célèbre journaliste politique français, son épouse Claire est connue pour ses engagements féministes. Ensemble, ils ont un fils, étudiant dans une prestigieuse université américaine. Tout semble leur réussir. mais une accusation de viol va faire vaciller cette parfaite construction sociale.”
Malgré un certain nombre de critiques qu'on peut faire sur ce roman, on ne peut pas nier que c'est une réussite puisque on le dévore littéralement. À différents degrés, c'est le sexe et sa perception qui sont au cœur du propos.
Le sexe, comme instrument de pouvoir, comme déclencheur d'un changement radical de vie, comme un acte anodin pour les uns mais une agression pour les autres.
À travers son roman, Karine Tuil nous interroge et nous bouscule à propos de la notion de consentement. Ne pas hurler « non » lors d'un acte sexuel ne veut pas dire que c'est « oui ». Mais peut-on juger de la même manière un homme qui savait que c'est” non” et un homme qui pensait que c'était « oui ».
Toute la première partie du livre présente l'ensemble des principaux protagonistes.
À ce moment, la lecture ne me plaisait que moyennement. Je trouvais le procédé de narration très américain, un peu à la Douglas Kennedy. On étale la réussite sociale des héros pour mieux les faire chuter ! Aucun personnage ne trouve grâce aux yeux du lecteur tant chacun est tourné vers un objectif totalement égocentrique.
Si, au début, j'ai trouvé cela dérangeant, je reconnais qu'au final c'est mieux ainsi. Lors du procès pour viol, notre regard sur l'affaire est beaucoup plus objectif que si on s'était attaché à l'un ou à l'autre des personnages.
On finit par être complètement happé par cette histoire, il est difficile de refermer le livre tant on veut arriver au dénouement.
La plaidoirie du jeune avocat de la défense est magistralement écrite. Elle résume parfaitement la problématique : que juge t-on ? quel est le poids du regard de la société ? quel rôle des médias et des réseaux sociaux ?...
Regrettons tout de même que l'auteur, une fois de plus, sacrifie à l'air du temps en chargeant la dose sur les thèmes à la mode.
Cela donne quelques incongruités comme la présence dans un court passage d'un « sympathisant djihadiste » !
Cela dit, l'ensemble et le fond du roman pose un problème sur les rapports homme-femme auquel il est urgent de s'intéresser.